« Je n’ai pas les moyens de faire la grève. »

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Par Richard Ballance

Nous sommes actuellement au cœur de négociations avec un employeur qui cherche à tout prix à réaliser des économies aux dépens des travailleurs. Les pourparlers avancent lentement, et de nombreux membres s’interrogent sur les mesures possibles. Nous avons tous entendu des membres déclarer qu’ils n’ont pas les moyens de faire la grève.

Nous sommes toutefois encore très loin d’un débrayage. Les négociations se poursuivent, quoique lentement. Toutes les parties sont présentes à la table. Avant de déclencher une grève, plusieurs événements doivent se produire.

D’abord, une grève légale ne peut avoir lieu en l’absence d’une entente sur les services essentiels, dans laquelle sont décrits tous les postes désignés comme étant essentiels. Le projet de loi C-4 confère au gouvernement le contrôle des services essentiels (bien que cette mesure soit probablement inconstitutionnelle), et le projet de loi C-31 a révoqué toutes les ententes sur les services essentiels qui existaient. Avant même que nous puissions songer à déclarer la grève, le gouvernement doit donc revoir et modifier les ententes sur les services essentiels.

De plus, une grève légale ne peut être déclenchée que si les membres de l’unité de négociation ont voté en faveur de cette mesure. Un vote de grève ne peut se produire que si la présidente nationale de l’AFPC l’autorise. À la lumière des résultats du vote, la présidente nationale de l’AFPC est alors autorisée à déclencher la grève. Avant de procéder au piquetage, les membres doivent avoir voté démocratiquement en faveur de la grève, et le président national de l’AFPC doit avoir lancé un débrayage.

Nous sommes encore loin de cette étape, pour l’instant. Il n’y aura aucun vote, à moins que les négociations aboutissent à une impasse.

Est-il vrai que nos membres n’ont pas les moyens de faire la grève? En cas de débrayage, nos membres ne seront pas rémunérés par l’employeur. Nous avons tous des obligations, que ce soit le remboursement d’un prêt hypothécaire, le paiement d’une automobile, les frais de scolarité de nos enfants, les nombreuses factures mensuelles (de chauffage, d’électricité, d’accès à Internet, de service téléphonique, etc.). De nombreux membres éprouveront des difficultés à s’acquitter de ces obligations s’ils ne sont pas rémunérés pendant une semaine ou deux. Et si le conflit se prolonge, la majorité des membres auront des ennuis.

Cependant, compte tenu de l’état actuel des négociations, j’estime que nous n’avons pas les moyens de ne pas faire la grève. Nous risquons de perdre beaucoup plus que quelques semaines de salaire.

Parmi les principales caractéristiques du régime d’assurance-invalidité de courte durée que notre employeur souhaite nous imposer, notons qu’avant d’avoir droit à quelque prestation que ce soit, il faudra subir une période d’attente de sept jours non rémunérée. Réfléchissez-y… Pour toute période de maladie s’additionnant à vos six jours de congé de maladie annuels, vous pourriez être contraint de patienter jusqu’à cinq jours ouvrables, sans rémunération, avant d’être admissible à l’assurance-invalidité de courte durée.

Le diable se cache souvent dans les détails. Qu’adviendra-t-il si vous tombez malade ultérieurement? Serez-vous automatiquement admissible à l’assurance-invalidité de courte durée ou serez-vous contraint à une autre période d’attente? Compte tenu de ce que je connais du domaine de l’assurance, j’estime que la deuxième hypothèse est la plus probable.

Au moment fatidique, vous risquez de ne pas recevoir le chèque de paie tant attendu. Pire encore, vous devrez négocier avec une organisation à but lucratif telle que la SunLife, qui tentera de réduire au minimum les indemnités qu’elle vous versera.

Ai-je les moyens de faire la grève? Pas vraiment. Compte tenu de ce que notre employeur nous offre, cependant, nos pertes risquent fort de nous coûter encore plus cher avec le temps. Nous n’avons pas les moyens de ne pas faire la grève.

La question de l’assurance-invalidité de courte durée peut s’avérer épineuse, surtout avec cet employeur. Soyons prêts.

Richard Ballance est le vice-président régional pour les membres du Conseil du Trésor de la région de la capitale nationale. Cet article a été rédigé dans le cadre du programme de journalisme syndical du Syndicat. Pour obtenir des renseignements supplémentaires, cliquez ici – si vous souhaitez proposer un article ou avez des questions, veuillez envoyer un courriel à communications@une-sen.org.