Qu’est-il arrivé à Africville?

Un article écrit par Céline Ahodekon

Quand Ben René, agent de communication du SEN, m’a demandé récemment d’écrire un article sur le sujet, je n’avais jamais entendu parler de la collectivité noire d’Africville. J’ai découvert, à ma grande stupéfaction, qu’on avait violé des  droits fondamentaux des gens de cette collectivité, et que cela s’est passé il n’y a pas si longtemps que ça.

Fermez les yeux un instant et imaginez la scène : la maison dans laquelle vous vivez va être rasée parce que quelqu’un, quelque part, a jugé que vos conditions de vie ne lui conviendraient pas. Mais cette personne ne vous prive pas seulement de votre maison, elle vous prive également de votre terre.

Comment vous sentez-vous?

Eh bien, c’est exactement ce qui s’est passé dans la plus ancienne et la plus importante collectivité noire d’Halifax – Africville –, qui s’était établie dans la ville plus d’un siècle plus tôt.

Il faut dire que la collectivité noire d’Africville devait se débrouiller sans des services de base comme l’eau potable, des routes pavées ou l’électricité; pourtant, elle se tirait bien d’affaire – jusqu’à ce que le conseil municipal d’Halifax déclare qu’Africville est un bidonville et envoie des camions à benne pour y faire le ménage. Et c’est ainsi que la population d’Africville est arrivée dans son nouveau lieu de résidence… dans la benne d’un camion1.

Un homme qui sortait de l’hôpital a découvert à sa sortie qu’il n’avait plus de maison2.

C’est toute la collectivité qui a été anéantie. Paradoxalement, les résidents arrachés à leur maison ont dû s’installer dans des logements publics eux-mêmes abandonnés3. Comment cela a-t-il été possible? Les gouvernements ne devraient-ils pas toujours tenter d’améliorer les choses?

Dans le cas qui nous occupe, les habitants d’Africville sont passés de conditions de vie médiocres à des conditions de vie encore pires…

À mon avis, ce que les autres disent importe peu : le chez-soi, c’est le lieu où vivent nos souvenirs. Africville, c’était le chez-soi de ces gens. C’était peut-être un des pires bidonvilles du pays, c’était quand même un milieu de vie pour ses résidents.

Un ancien résident résume la situation de cette façon : « Nous n’avons pas seulement perdu le toit au-dessus de nos têtes : la collectivité noire d’Africville a perdu sa joie de vivre, sa culture, son identité et, en conséquence, son âme4. »

« Les habitants d’Africville ne pouvaient pas compter sur une organisation qui aurait défendu ses droits », affirme un participant dans un documentaire5. Encore une fois, chers confrères et chères consœurs, cet épisode me rappelle que, pour gagner une bataille, nous devons nous serrer les coudes et montrer qu’une attaque contre un est une attaque contre tous.

Ensemble, nous sommes plus forts!

Quel était le véritable motif de la destruction du quartier noir d’Africville, à Halifax (Nouvelle-Écosse) et du déplacement de ses habitants? Nous ne le saurons jamais vraiment. Toutefois, bien des choses ont changé depuis. Le site d’Africville est aujourd’hui un parc. Et les gens qui ont été évincés subissent toujours les contrecoups de la perte de leur chez-soi.

Chers confrères, chères consœurs, février est le Mois de l’histoire des Noirs. Profitons de l’occasion pour lire et en apprendre davantage sur le parcours, l’histoire et les réalisations des Noirs du Canada.

Céline Ahodekon est représentante du groupe d’équité des minorités visibles pour le Syndicat national des employées et employés nationaux. Elle est également déléguée syndicale de la section locale 20278, dont les membres sont les employés du Lieu historique national du Fort-Langley et le bureau de parcs à Vancouver, en Colombie-Britannique.

Céline dit qu’elle se fait souvent demander, à Fort-Langley, si elle est historienne. La question la fait rire, et elle répond : « Je suis une femme d’affaires. J’ai un diplôme en administration des affaires avec concentration en vente et marketing de l’Université Laval. Je peux tout vendre, si je crois au produit et s’il m’inspire confiance. »

« Je crois qu’il faut protéger le riche et magnifique patrimoine naturel et culturel du Canada afin que les Canadiennes et les Canadiens en profitent aujourd’hui et dans les années à venir. »

Si vous désirez en apprendre davantage sur Africville, Mme Ahodekon vous propose de visionner  le film Remember Africville (en anglais) de Shelagh Mackenzie, d’une durée de 35 minutes, à partir du site de l’Office national du film du Canada. Nous vous encourageons également à suivre les hyperliens figurant dans les notes de bas de page.


[1] Encyclopédie canadienne, Africville. (en anglais)
[2] Idem
[3] Idem
[4] Archives numériques de la SRC, Officials hail Africville relocation. (en anglais)
[5] Idem